En 2024, j’ai retrouvé avec délice deux de mes artistes préférés. Leïla Slimani a illuminé notre séjour au Maroc en février avec la suite de sa saga familiale, Regardez-nous danser (vivement le troisième volet, début 2025 !) 💃🏻 🇲🇦. Gaël Faye m’a émue, comme à son habitude, mais il m’a aussi bluffée : son écriture a gagné en maturité et en profondeur avec Jacaranda (mon Goncourt à moi) 🌱 🇷🇼.

« En fin de journée, Aïcha enfilait sa vieille paire de tennis et marchait dans les champs, ses poches remplies de cailloux pour effrayer les chiens errants. Elle arrachait des arbres des oranges à peine mûres dont elle savait exactement, avant même de les sentir, avant même de porter un quartier à ses lèvres, quel goût elles auraient. Elle s’allongeait dans l’herbe et contemplait le ciel dont le bleu lui était souvent revenu en rêve, pendant son exil alsacien. Le ciel, ici, était nu, offert, comme si une main divine avait arraché tout ce qui pourrait le couvrir, l’obscurcir, le faner. Des oiseaux volaient, parfois seuls, parfois en nuée, et, sous le vent, les branches des palmiers et des oliviers se balançaient, éveillant en elle des désirs de tempêtes ».
Publié aux éditions Gallimard.

« J’observais les gamins s’amuser comme on se venge de tout – des enfances gâchées, des bagarres de rue, des coups de couteau et de machette, des nuits à dormir dehors, des overdoses de colle à sniffer, des familles décimées, de la misère crasse, de l’alcool frelaté, des viols, des maladies, de l’indifférence ou de la pitié des honnêtes gens. Ce soir-là, les enfants se tressaient des lauriers, chantaient leurs propres louanges, étaient princes et princesses en leur Palais. Toute leur énergie tendue vers la joie simple d’être en vie. »
Publié aux éditions Grasset.
Prix Renaudot 2024.
La force, la poésie et la résilience de l’amour maternel : une thématique chère à mon cœur (certainement pas sans raison, en cette année spéciale avec ma première grossesse…), que j’ai retrouvée dans les merveilleux romans de Kiyémis avec Et, refleurir 🌻 🇨🇲 et de Carole Martinez avec Dors ton sommeil de brute 🌬️🤰.

« Demain au soir,
Les femmes-océans découvriront,
Que, non, finalement,
Elles n’ont pas chaviré,
Que, oui, malgré les larmes,
Depuis toujours,
Elles savent nager. »
Publié aux éditions Philippe Rey.

« Je lui ai avoué que je ne voulais pas d’enfant, que je n’avais jamais aimé les enfants des autres, ni même joué à la poupée quand j’étais petite. Je lui ai dit qu’elle était née un peu malgré moi et, que, grâce à elle, j’avais compris ce que c’était qu’aimer.
Quelle surprise ! Elle m’avait mise au monde en naissant. Elle était à la fois mes racines et ma canopée, la source et l’embouchure, elle était le mouvement de toutes les rivières qui me parcouraient, elle m’offrait la beauté et la joie de vivre. Elle m’avait multipliée. »
Publié aux éditions Gallimard.
La condition de la femme reste l’un de mes sujets de prédilection. Lire Hors-champ de Cristina Comencini 👩 ✊ et Betty de Tiffany McDaniel 💔 🫙, c’était me révolter, mais aussi chercher encore et toujours les racines profondes de la sororité.

« Et si le désir d’enfant était l’acte le plus inconsidéré et révolutionnaire de tous ? Au sens premier de porteur d’un renouveau radical. Même si, il faut bien le dire, personne, au cours de l’Histoire, ne s’en est aperçu. Sauf peut-être le taoïste Lao Tseu qui, lorsqu’on lui a demandé de définir la vie d’un être humain, a répondu : « Il est né, il a eu un enfant et il est mort ». »
Traduit de l’italien par Béatrice Robert-Boissier. Publié aux éditions Stock.

« Ce n’est pas facile d’être une femme, P’tite Cherokee. Et surtout, ce n’est pas facile d’être une femme qui passe sa vie à avoir peur de celle qu’elle est vraiment. »
Traduit de l’anglais (USA) par François Happe.
Publié aux éditions Gallmeister.
Il est primordial d’analyser notre passé pour combattre nos erreurs présentes. J’ai lu deux grands romans historiques. Le puissant Frère d’âme de David Diop sur les tirailleurs sénégalais ☠️ 🪖 et le destin hors-norme de Aminata de Lawrence Hill sur le commerce triangulaire et l’esclavagisme ⛓️ 🌍. Deux textes à lire !!

« La folie temporaire est la sœur du courage à la guerre.
Mais quand on donne l’impression d’être fou tout le temps, en continu, sans arrêt, alors là on fait peur, même à ses amis de guerre. Alors là on commence à ne plus être le frère courage, le trompe-la-mort, mais bien l’ami véritable de la mort, son complice, son plus que frère. »
Publié aux éditions Seuil puis Points en format poche.
Prix Goncourt des Lycéens en 2018 & International Booker Prize en 2021.

« Un cycle complet de la lune s’était écoulé depuis notre départ. Les prisonniers continuaient de mourir au rythme d’un ou deux par jour. On ne portait aucun respect aux morts. Le bruit d’un cadavre tombant dans l’eau m’horrifiait de plus en plus et offensait l’esprit des morts. J’étais d’avis que ce traitement qu’on leur faisait subir était pire que de les tuer. J’écoutais le bruit de la chute dans l’eau, même s’il m’effrayait, mais la chose qui me bouleversait encore plus, c’était de n’entendre aucun bruit. Pour moi, un plongeon silencieux signifiait que le cadavre sombrait dans l’oubli. »
Traduit de l’anglais (Canada) par Carole Noël.
Publié aux éditions Gallimard et Folio.
2024 a été une année inhumainement meurtrière à Gaza. Parce que les Palestiniens méritent qu’on prie pour leur quotidien et leur avenir, lire Yara El-Ghadban et son roman La danse des flamants roses nous rappelle que l’espoir ne doit jamais s’éteindre 🦩 🇵🇸 .

« Combien de langues les humains avaient-ils inventées ? Combien en avaient-ils oublié ? Il a fallu la fin du monde pour retrouver la première de toutes les langues, celle qui nous liait à la vie. »
Publié aux éditions Mémoire d’encrier.
Prix Mare Nostrum 2024.
Côté essais, je continue mes précieuses réflexions sur ma déconstruction. James Baldwin et son La prochaine fois, le feu n’ont pas pris une ride 🔥✊🏿. Nesrine Slaoui et son Notre dignité mont passionnée sur le sujet de l’intersectionnalité ✍️ ‼️.

« La plus dangereuse création de toute société, quelle qu’elle soit, est l’homme qui n’a plus rien à perdre. Point n’est besoin de dix de ces hommes-là. Un seul fera l’affaire. »
Traduit de l’anglais (USA) par Michel Sciama. Publié aux éditions Gallimard.

« Cette alliance du racisme et du sexisme, qui nie l’existence des femmes maghrébines et de leur réalité, je la qualifierai d’arabisogynie. »
Publié aux éditions Stock.
N’en choisir qu’un est toujours chose difficile. Mais le voici : Je pleure encore la beauté du monde de Charlotte McConaghy 🐺 🌳. Un roman éblouissant qui nous emmène avec Inti dans les Highlands au côté des loups. Une réflexion nécessaire sur ce que signifient les termes cruauté et animalité.

« À partir du moment où vous décidez avec votre cœur de régénérer un coin de nature, c’est votre être tout entier que vous allez régénérer. »
Traduit de l’anglais (Australie) par Marie Chabin. Publié aux éditions Gaïa.
🌟 Et vous ? Un roman à retenir en 2024 ? 🌟

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