Dans ce climat révoltant lié à la loi immigration, lisez Wang de Pierre Bordage…

Wang est un jeune homme né dans la république Sino-Russe, de l’autre côté du R.E.M, le mur électromagnétique. Le Tao de la Survie de Grand-Maman Li infuse ses actes et ses décisions. Il lui sera indispensable lorsqu’il passera le mur, pénétrant dans le monde mystérieux de l’Occident.

« Tzeu se tortilla sur place, les mains crispées sur son bas-ventre, comme s’il était pris d’un besoin pressant.

« Qu’est-ce que vous allez faire de nous, monsieur ? »

Une question qu’ils avaient tous envie de poser mais que seul un enfant inconscient était en mesure de formuler.

« Vous passerez bientôt des tests d’aptitude à l’issue desquels vous recevrez votre affectation.

– C’est quoi une affect… une affectation ?

– L’Occident vous protégera, vous nourrira, vous soignera en contrepartie de votre travail. Un marché équitable, tu ne crois pas ?

– Et… ma mère ? Et mes sœurs ? »

Des larmes avaient perlé au coin des paupières de Tzeu. Son vis-à-vis l’enveloppa d’un regard froid où ne brillait aucune lueur de bienveillance ou de compassion.

« Nous ne recevons pas les immigrants pour reconstituer leur vie de famille, lâcha-t-il d’un ton sec. L’expérience nous a enseigné que les problèmes surgissaient dès que les clans se reformaient. Nous prônons l’intégration par l’immersion totale. Dans un passé pas si lointain, les immigrants regroupés en ghettos ont failli causer la perte des pays qui les avaient accueillis. »

Dans les trois territoires séparés de l’Occident (la République populaire sino-russe, RPSR, la Grande nation de l’islam, GNI, et le territoire des Sudams), les rumeurs les plus folles courent au sujet de l’Occident. On parle de vol d’organes, de jeux du cirque mortels pour se divertir. Face à la violence du quotidien, rarement par choix, nombreux sont ceux qui tentent malgré tout leur chance. Wang se retrouve enrôlé dans l’armée française, à combattre durant les Jeux uchroniques. La vie des migrants ne vaut rien. Elle prolonge celle des Occidentaux ou leur procure des sensations depuis longtemps oubliées.

« L’Occident tout entier est devenu un vampire qui se nourrit du sang et de la chair de ses voisins… »

Le chaos rétablira-t-il l’équilibre ? Wang, aidé par ses ancêtres et le Tao de la Survie de grand-maman Li, est-il le grain de sable qui détraquera la machine occidentale ?

Dans les années 1990, Pierre Bordage écrit cette duologie dystopique effrayante. Et si l’Occident érigeait des murs pour protéger son empire ? Et si les occidentaux n’étaient plus capables de cohabiter, se perdaient complètement dans les méandres technologiques ? Et si l’humanité plongeait dans l’obscurantisme, l’autoritarisme, les guerres de gangs et de religions ? Et si l’humain perdait son âme ? L’Occident qu’il dépeint est une abomination. Les pires travers de l’homme se déploient dans un futur monstrueux.

« – L’Occident nous a imposé son rêve, son modèle, depuis trop longtemps, reprit Wang. Depuis qu’il a débordé de ses frontières et que, fort de sa puissance militaire, il a conquis ses colonies. Il a détruit nos traditions, notre médecine, notre architecture, notre équilibre écologique, il nous a infligé son dieu, ses médicaments, sa nourriture, son mode de pensée, sa pollution. Il a voulu créer le monde à son image, comme son dieu a créé l’homme à son image. Nous sommes devenus ses clones, y compris dans nos modes de gouvernement. »

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