Amies devenues inséparables malgré leurs différences sociales et ethniques, Flora et Yasmina étudient ensemble à l’université d’Abidjan où elles partagent une chambre à deux. Lorsque la crise électorale éclate entre Ouattara et Gbagbo en 2010, elles essaient coûte que coûte de se maintenir à flot, de soutenir leur pays et de préserver leurs idéaux. Mais la Situation les rattrape et finit par gravement les impacter, tant dans leur amitié que dans leur personne…
« Droits devant leur pupitre, les candidats étaient à l’aise dans leur costume impeccable. À la suite d’un tirage au sort, la première question revint à l’opposant : « Pourquoi voulez-vous être candidat à la présidentielle ? ». Voilà, le face-à-face avait commencé ! Difficile de bien suivre les échanges tant les camarades bavardaient et faisaient du bruit. Peut-être parce que, dans le studio de télévision, l’atmosphère semblait très détendue. Plus d’une fois, Gbagbo appela son rival « mon frère ». Parmi les filles assemblées, des soupirs de soulagement s’élevèrent, pendant que d’autres haussèrent les épaules. « C’est quel genre de « frère », ça ? ».
Éclats de rire. D’une manière générale, tout le monde était d’accord : « C’était super, impec !». Il n’y avait rien à redire, pour une première, il s’agissait d’une réussite. L’heure de la maturité avait sonné. « Vous voyez, on peut se parler sans hurler, sans taper du poing. La démocratie est mûre chez nous. » Des jus de fruits et des arachides grillées conclurent la soirée. Une douce brise caressa le pays.«
Je remercie la nuit est un roman très juste, aux personnages attachants (tant les deux héroïnes que tous les personnages qui gravitent autour d’elles). Véronique Tadjo donne de la voix à la jeunesse. Elle écrit les espoirs déçus d’une génération entière, les peurs, mais aussi les reconstructions possibles. Flora et Yasmina voient leurs belles années brisées, mais malgré tout, petit à petit, elles se relèvent. À l’image de la Côte d’Ivoire ?
« À toutes les étapes importantes de sa vie, son père avait été présent. Lorsqu’elle avait commencé à marcher. Lorsqu’elle avait appris à lire et à écrire. Lorsqu’elle était montée sur son premier vélo. Lorsqu’elle avait eu son bac. Et enfin, lorsqu’elle était entrée à l’université. Toujours là, toujours fier. Peut-être l’avait-il trop gâtée? Il lui avait appris à être libre, alors que sa mère voulait la garder à la maison le plus longtemps possible. Ainsi, pour faire fléchir sa femme, il lui avait rappelé que les enfants n’appartenaient pas à leurs parents. « Nous n’en avons que la garde, ils sont destinés à partir un jour. Si les liens sont solides, ils reviendront. » Elle s’était souvent demandé à qui il s’adressait exactement. Probablement à toutes les deux. »

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