Une dystopie francophone dévorée en deux jours.

Envie d’une dystopie francophone qui questionne les ravages du capitalisme, les excès de la société de consommation, l’imminence de la crise climatique et le glissement fasciste contemporain ? Ce roman, le premier d’une duologie, est fait pour vous ! Addictif et bien ficelé, il est à la fois riche de ses remises en question et de ses personnages principaux.

« Bien que l’idée ait mis du temps à être acceptée par la population, il fut avéré dès les années deux mille que la croissance de la société de consommation serait rapidement incompatible avec la survie du plus grand nombre. »

L’Histoire officielle des Phalanstères – extrait.

La construction est originale : au début de chaque grande partie, on commence par un saut dans le passé, au côté d’Alise, au moment où le monde bascule. Puis on revient à l’heure du roman, au côté de Colin, en 2103, dans l’une des Phalanges qui structure la nouvelle société.

Face à la pénurie des ressources engendrée par la crise climatique, toute l’économie a été rationnalisée. Brillant et sérieux, Colin travaille dans un Rationalisateur, afin de gérer l’une des caractéristiques humaines responsables des déviances de l’économie : les émotions. En régulant les émotions, on peut espérer pérenniser la société et le vivre-ensemble. Mais lorsqu’une mystérieuse jeune femme dénommée Léonie débarque dans le Rationalisateur, la vie de Colin bascule.

J’ai dévoré le roman en deux jours. Il n’est pas sans nous rappeler les heures sombres de la Seconde Guerre mondiale, les espoirs déçus de la Résistance, et la nature humaine qui, malgré tout, cherche la liberté à tout prix. Il sort aujourd’hui en librairie : foncez le découvrir !

« Aujourd’hui, Colin et Nicolas devaient se contenter de sélectionner l’option d’une rationalisation quasi totale, qui consistait à effacer principalement les souvenirs attachés à une émotion des deux Phalanstériens. Au signal de la machine, Nicolas abaissa le levier destiné à enclencher le processus. L’appareil se mit à émettre un grondement, immédiatement couvert par une douce musique, destinée à rassurer la personne traitée.

Encore impressionné par l’opération, malgré son année d’exercice, Colin ne pouvait détacher ses yeux de la chambre. Il y vit Léon Dupuis, plongé dans le noir complet par le masque couvrant ses yeux, prendre une profonde inspiration alors que la fréquence des battements de son cœur angoissé se réduisait. Mais il était incapable de deviner ce qui se jouait dans la tête du vieil homme, ni qu’il tentait de s’accrocher à tout ce qui avait fait la richesse de sa longue vie, y compris avant la Pénurie générale.

Il ignorait tout des pensées qui s’entassaient à une vitesse folle dans l’esprit du sujet, qui goûtait, une ultime fois, à la liberté de les laisser vagabonder. À l’insu des rationalisateurs, il songeait à son enfance, heureuse malgré le pessimisme de l’époque, les mauvaises nouvelles qui s’accumulaient au gré des bulletins d’informations et les tours joués aux humains par le climat capricieux.

Il se souvenait de l’odeur du soleil sur sa peau, de l’herbe fraîchement tondue et de cette insouciance qui saisissait les gens quand les jours s’allongeaient. Il entendait le grondement du tonnerre et le clapotis de la pluie sur la tôle quand il s’endormait, à l’abri dans son lit. »

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