Quelle agréable surprise que ce roman de l’imaginaire signé Nathalie Cirac. Nous y suivons Livie, une lycéenne au destin très particulier. Un an et demi après le décès mystérieux de son père, Livie, sa mère et ses deux frères quittent la région parisienne et commencent une nouvelle vie. Ce déménagement fait basculer le quotidien de Livie. Elle apprend qu’elle possède des dons de passeuse d’âme. Tout au long du roman, nous découvrons avec elle ce que ce statut implique. Aider les âmes coincées dans l’Entre Monde à rejoindre l’au-delà n’est ni un jeu d’enfant, ni une partie de plaisir. C’est un rôle primordial pour soulager les êtres. C’est aussi un rôle dangereux, et Livie le découvrira parfois à ses dépens.

« Alors que je me penchai pour admirer un trio de femmes qui glissaient vers le dôme, je fus brusquement frappée par la compréhension que ces âmes n’étaient pas seulement lumière, mais aussi souffrance.

Une sensation mêlant désespoir, solitude, angoisse et chagrin brut s’empara de moi, pétrifiant chaque partie de mon corps jusqu’à la moindre goutte de sang dans mes veines ; il irradiait de ces lieux une douleur incommensurable que je ressentais au plus profond de mon être. »

Je me suis beaucoup attachée à Livie, au Chapelier Fou, à Carline, à Louis. J’avais hâte, chaque jour, de les retrouver, de découvrir ce que l’Entre Monde nous réserverait cette fois. Et quelle belle écriture ! Nathalie Cirac allie la plume et l’imagination : tout cela donne un premier roman réussi (dont j’ai d’ailleurs adoré la toute fin !).

Petite mise en garde : les pérégrinations quotidiennes de Livie sont celles d’une jeune femme qui se rend au lycée et vit avec sa mère et ses frères. Ses atermoiements adolescents ne plairont peut-être pas à tous les lecteurs. De mon côté, je l’ai trouvée parfaitement réaliste, j’ai souvent été amusée et j’ai parfois levé les yeux au ciel en me souvenant que oui, le lycée c’était comme ça.

Une découverte de l’imaginaire francophone que je recommande. Une couverture incroyable signée par l’artiste Ardif. Il me tarde de me replonger dans cet univers. Vivement la suite !

« La douleur des âmes m’avait transpercée. Elles avaient, au moment de leur mort, connu la perte simultanée de tous les êtres qui leur étaient chers Elles avaient assisté, impuissantes, à leurs pleurs et à leur souffrance. Parfois, elles avaient découvert à leurs dépens leur véritable personnalité. Puis, elles les avaient vus mourir, sans pour autant pouvoir les rejoindre. Et enfin était arrivé le jour où plus aucun de ceux qui les avaient aimées ou seulement connues n’était en vie. Elles se retrouvaient seules, dans cet Entre Monde hostile, sans but, sans savoir si elles pourraient le quitter, avec l’incompréhension et la colère pour toute compagnie. Les années passant, elles erraient, hésitant entre se souvenir d’une vie de plus en plus lointaine ou se résigner en l’oubliant.

Je ne pouvais me promettre qu’une seule chose : je mettrais tout en œuvre pour les faire passer dans l’Autre Monde. Cependant, cette épreuve m’avait fait prendre conscience que, comme le Chapelier l’avait affirmé, je n’étais pas prête à vivre une expérience aussi intense que semblait l’être un passage d’âmes. »

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